Des neurologues proposent de modifier les critères du diagnostic de la maladie d'Alzheimer
Une équipe internationale de spécialistes de neurologie estime que le moment est venu de procéder à une redéfinition des critères permettant d'établir le diagnostic de la maladie d'Alzheimer, la plus fréquente des affections neurodégénératives. Cette initiative, coordonnée par Bruno Dubois (hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris, unité Inserm "Neuro-anatomie fonctionnelle du comportement et de ses troubles"), résulte des nouvelles connaissances, acquises ces dix dernières années, concernant la physiopathologie de cette maladie. Ces résultats ont été publiés, lundi 9 juillet, sur le site Internet de la revue The Lancet Neurology.
Les auteurs de cette publication expliquent ainsi que la nouvelle grille diagnostique qu'ils proposent se fonde sur les études des processus neurobiologiques ainsi que sur la corrélation - établie grâce à la neuro-imagerie cérébrale - entre les premiers épisodes de perte de mémoire et la présence d'altérations de zones spécifiques du cerveau. Ils soulignent aussi que leur méthode présente l'avantage de permettre d'établir un diagnostic beaucoup plus précoce et ce dès les tout premiers signes de la maladie. Aujourd'hui, ce diagnostic n'est généralement porté qu'au stade de la perte totale d'autonomie, un état qualifié de "démence" par les neurologues.
Cette publication est le fruit d'un travail lancé il y a deux ans et qui a réuni des spécialistes de six nationalités différentes. Il s'agissait de procéder à une actualisation de critères diagnostics qui, datant de 1984, ne pouvaient pas tenir compte des résultats fournis par les techniques d'imagerie par résonance nucléaire (IRM) ou par émission de positons.
PRISE EN CHARGE PLUS PRÉCOCE
"Il existe un faisceau de preuves aujourd'hui que l'apparition des premiers signes cliniques indique que le processus d'altération du cerveau est en marche, via, notamment, le dépôt de plaques d'une protéine appelée bêta amyloïde, explique Bruno Dubois. Ainsi, lorsque l'on détecte chez le patient des troubles fonctionnels dans le domaine de la mémoire, le processus de dégénérescence du tissu cérébral est déjà significativement avancé. Nous pensons être parvenus à repérer le plus tôt possible les premiers éléments spécifiques - de nature biologique, clinique, et neuroanatomique - de la maladie, et ce avant même que les éléments caractéristiques d'un syndrome démentiel ne soient présents."
En pratique, le diagnostic peut être porté quand un critère majeur (troubles de mémoire observés par le patient ou ses proches depuis plus de six mois ; confirmation de la nature de ces troubles par des tests spécifiques) est associé à des critères mineurs parmi lesquels une atrophie de l'hippocampe à l'IRM, des taux anormaux de certains biomarqueurs dans le liquide cérébrorachidien ou encore des anomalies du métabolisme dans les régions temporale et pariétale du cerveau, identifiées par des outils de neuro-imagerie fonctionnelle.
Les chercheurs estiment pouvoir proposer une prise en charge thérapeutique nettement plus tôt, au stade de la prédémence. Ils espèrent qu'un diagnostic très précoce associé à de futurs traitements médicamenteux ou immunologiques permettra de retarder, voire de stopper, la progression des lésions cérébrales à l'origine de la maladie d'Alzheimer.
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