sexta-feira, 8 de junho de 2007

Les raisons d'une défaite

Journal Le Monde

L'indiscutable défaite de Ségolène Royal


Depuis le 6 mai au soir, on ne sait plus très bien s'il faut considérer le score de Ségolène Royal comme une défaite prometteuse, une quasi-victoire ou un échec sans appel. Le passage aux élections législatives comme les enjeux internes au Parti socialiste ont différé voire empêché d'apporter des réponses à une question pourtant fondamentale. A leur façon et avec leurs limites, les données de sondages recueillies par le Cevipof tout au long de la campagne et au lendemain de l'élection fournissent des données précieuses pour comprendre le vote des Français et apprécier la signification du résultat de Mme Royal.


L'examen de la sociologie du vote permet de constater que Mme Royal réussit à dominer Nicolas Sarkozy dans trois catégories qui jouent un rôle-clef dans la fédération de son électorat : les jeunes, les diplômés et les minorités. Parmi les électeurs de moins de 25 ans, elle recueille 63 % des suffrages exprimés, seize points de plus que Jospin au second tour de 1995, mieux même que Mitterrand en 1988. Parmi les électeurs ayant au moins le baccalauréat comme diplôme, elle atteint 56 % des voix. Ce soutien des diplômés est le vecteur du vote en sa faveur des professions intermédiaires (58 %), des salariés du public (56 %) et de sa bonne tenue dans les grandes villes, où leur poids est important (elle obtient en moyenne 49,7 % dans les communes comptant plus de 50 000 inscrits).

Plus spectaculaire encore est le soutien massif des minorités à Ségolène Royal. Parmi les Français qui déclarent avoir un parent étranger, le vote en sa faveur est de 56 %, parmi ceux qui n'ont qu'un grand- parent étranger, il tombe à 52 %, et parmi les Français sans ascendance étrangère (qui représentent les trois quarts de la population), il n'est plus que de 45 %.

Mais les données du Cevipof permettent d'être plus précis encore. Parmi les électeurs ayant une origine étrangère provenant des autres pays européens, le score de Mme Royal est de 48 %, et parmi ceux qui ont une origine étrangère provenant d'un pays africain, il monte à 76 % contre 24 % seulement à Nicolas Sarkozy. Ces indications se trouvent confirmées par les données électorales que l'on relève dans beaucoup de communes ou de cantons de Seine-Saint-Denis ou du Val-de-Marne. Il faut prendre conscience que, dans l'isoloir, deux France se sont opposées. Du côté des catholiques pratiquants, Nicolas Sarkozy a recueilli 77 % des suffrages exprimés et sa rivale 23 % ; du côté des musulmans, Ségolène Royal atteint... 94 % des suffrages exprimés et son adversaire 6 %.

Le 6 mai, Ségolène Royal a ainsi fédéré le vote des "insiders" (les diplômés, les habitants des grandes villes, les salariés du public) et des exclus (les minorités et les jeunes, qu'on peut d'une certaine façon y classer). Il est frappant de constater que, selon la facilité avec laquelle on déclare s'en sortir sur le plan financier, la candidate socialiste ne l'emporte que dans les deux catégories extrêmes : les personnes qui s'en sortent très difficilement, comme il est classique pour la représentante de la gauche (mais à seulement 51 %), et aussi celles qui déclarent vivre "très facilement", comme cela est moins attendu (plus nettement, à 54 %). Sachant que l'essentiel des Français vit "difficilement" ou au mieux "facilement", l'alliage des "insiders" et des exclus s'est révélé minoritaire. Suite...

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