sábado, 22 de dezembro de 2007

Toulouse: à la retraite, le flic de gauche se lâche contre Sarkozy




En 2003, l’ancien commissaire Jean-Pierre Havrin, apôtre de la police de proximité à Toulouse, était pris publiquement à partie par Nicolas Sarkozy en personne. "Les policiers ne sont pas là pour organiser des matchs de rugby avec les jeunes des quartiers", lui avait lancé le ministre de l’Intérieur. (Voir la vidéo, extrait d'un montage BakchichTV)


Aujourd’hui à la retraite, ce flic de gauche a décidé de défendre son bilan. "Je me lâche, je me sens devenir un citoyen à part entière". Retraité depuis le 2 décembre, l’ancien directeur départemental de la sécurité publique de Toulouse, désormais libéré du "fardeau" que représentait pour lui le devoir de réserve, et s’en donne à coeur joie avec les journalistes. "Comment Sarkozy m’a viré", "Le match retour de Jean-Pierre Havrin": la presse locale attendait cela depuis cinq ans.

Les médias nationaux se captivent aussi pour ce personnage atypique. Jean-Pierre Havrin, c’est en effet l’histoire d’une étonnante symbiose. Celle d’un flic plein de gouaille, amateur de bonne chère et de chansons paillardes, et d’un autodidacte diplômé en droit des affaires, ancien conseiller de Jean-Pierre Chevènement, amateur de poésie.

Mercredi, une équipe de la rédaction nationale de France 3 l’a suivi pendant une journée. L’occasion rêvée pour Havrin d’organiser un petit coup de provoc’ devant le commissariat de Bagatelle, le lieu où il avait été "descendu" par Nicolas Sarkozy.

Amis policiers, personnalités politiques, journalistes, anciens jeunes des quartiers: tous sont réunis pour un apéro quelque peu ostentatoire au Bagatelle, le café qui fait face au commissariat. Pierre Cohen, le candidat PS aux municipales est présent. Quoi de plus normal, Jean-Pierre Havrin est inscrit sur sa liste électorale.

Karim Faïssan, un trentenaire habitant la Reynerie, un quartier sensible de Toulouse est venu saluer l’instigateur de la police de proximité:

"Quand on traînait en bas des immeubles, les policiers venaient nous voir, ils connaissaient tous nos prénoms et nos familles. Ils venaient nous engueuler, mais ils nous conseillaient aussi.

"J’ai fait de la prison. Un policier m’a aidé à me réinsérer à ma sortie. C’était un type que je détestais parce qu’il m’avait passé les menottes plusieurs fois. Mais personne d’autre ne m’a aidé à ce moment là. Maintenant qu’il n’y a plus la 'pol prox', entre les jeunes et la police c’est oeil pour oeil, dent pour dent."

"Nous étions sur la bonne voie"

Pour Nicolas Sarkozy, l’épisode toulousain visait à décrédibiliser la police de proximité en l’assimilant à de la simple prévention et à une preuve de l’inefficacité des politiques de gauche en matière de sécurité, trop laxistes à son goût.

Jean-Pierre Havrin a donc été mis au placard, un placard doré: la direction de la Fédération sportive de la police francaise. "Il me donnait ce que je voulais à condition que je ferme ma gueule." Pendant cinq ans, il s’est donc tu, ou presque -il a tout de même collaboré avec Le Canard enchaîné.

La pilule reste dure à avaler pour celui qui, depuis son entrée au cabinet de Jean-Pierre Chevènement, ministre de l’Intérieur de 1997 à 2000 n’a cessé de promouvoir "une police au service des citoyens, et non au service du pouvoir".

Selon Havrin, Sarkozy aurait profité de l’effet pervers que produit la "pol prox" sur les statistiques pour mieux la stigmatiser:

"Il disait que la délinquance avait augmenté à Toulouse en se basant sur le taux d’élucidation, qui était proche de zéro. Ce qui est normal quand on fait de la police de proximité: on prend toutes les plaintes, même des conflits de voisinages.

En revanche, les habitants des quartiers venaient nous dire qu’ils dormaient mieux, peu à peu les commerces réouvraient dans les quartiers chauds comme le Mirail. Nous étions sur la bonne voie."

L’ex-patron de la police dénonce une récente régression des rapports entre jeunes et policiers, et fait le lien entre les violences de 2005 en banlieue et l’abandon de la police de proximité.

Qu'en reste-t-il aujourd'hui? Havrin décrit des troupes démotivées:

"Les agents que l’on appelait les 'proximiers', qui connaissait bien les jeunes, ont très mal vécu le désaveu du ministre. Il ne comprenaient pas, ils s’étaient tellement investis sur le terrain."

Sous couvert d’anonymat, l’un d’entre eux explique que tous les proximiers ont ensuite demandé une mutation, déprimés: "Nous n’allions quand même pas retourner patrouiller dans une voiture, après tout ce que nous avions réalisé auprès des jeunes."

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