Pour Ségolène Royal, la stratégie du "Tout sauf Sarkozy" ne suffira pas
LEMONDE.FR 22.04.07 23h30 • Mis à jour le 23.04.07 17h16
L'intégralité du débat avec Michel Noblecourt, le 23 avril, éditorialiste au "Monde", qui revient sur les thèmes que la candidate socialiste doit développer pour capter l'électorat centriste : réforme des institutions, Europe, urgence écologiste...
Michelgre : Mathématiquement la victoire de Nicolas Sarkozy semble assurée. A-t-on dans le passé déjà constaté une inversion de tendance par rapport au premier tour ? Est-ce possible en 2007 ?
Michel Noblecourt : Je pense qu'il ne faut pas raisonner d'une manière mathématique seulement. Si vous regardez l'élection de 1981, la référence en quelque sorte, vous observez que Royal fait un score quasiment identique à celui de Mitterrand qui avait fait 25,9 % au premier tour. Et il était déjà en 1981 derrière Giscard d'Estaing, président sortant, qui avait réalisé 28,3 %. Nous sommes en présence d'un écart plus important, puisque Sarkozy a dépassé les 30 %.
Autre différence : l'absence de réserves consistantes du côté des petits candidats de gauche, puisqu'en 1981, là aussi, il y avait un candidat communiste, Georges Marchais, qui avait obtenu 15,3 %, alors qu'aujourd'hui Marie-George Buffet fait moins de 2 %. Il y a donc peu de réserves à gauche, et dans une large mesure, le résultat du second tour dépendra du comportement de l'électorat de Bayrou. Et pour une part aussi de l'électorat du FN.
aboukamos : Qu'avez-vous pensé du discours de Ségolène Royal hier?
Michel Noblecourt : Je pense que son discours manquait de punch et de la conviction dont à mon avis il faut qu'elle fasse preuve pour le 2e tour. Je pense aussi qu'elle aurait dû intervenir plus tôt. C'est peut-être une ébauche des discours à venir.
pédro : Est-ce que Ségolène Royal peut rassembler toute la gauche ?
Michel Noblecourt : Elle semble bien partie pour cela. Vous observerez que dès le soir du scrutin, tous les candidats de la gauche et de l'extrême gauche ont soit appelé à voter pour elle, c'est notamment le cas d'Arlette Laguiller, soit appelé, comme Besancenot et Bové, à battre la droite. Je pense donc que le réflexe anti-Sarkozy, très fort dans l'extrême gauche, va jouer en faveur de Royal au deuxième tour.
RobertK : Le départ d'Eric Besson et son ralliement au camp de Nicolas Sarkozy n'est-il pas la preuve que Mme Royal a des difficultés à rassembler dans son propre camp ? Est-ce que certains "éléphants" n'ont pas intérêt à ce qu'elle trébuche afin d'être libre de préparer la prochaine élection présidentielle de 2012 ?
Michel Noblecourt : En ce qui concerne Eric Besson, je pense que c'est quelqu'un qui a obtenu sa notoriété en trahissant son camp. Il était secrétaire national à l'économie. Ce qui sera intéressant, ce sera de voir l'utilisation qu'il pourra faire au service de Sarkozy du petit livre qu'il avait édité en janvier, qui dénonçait le danger représenté par Sarkozy.
C'est vrai que les éléphants ont apporté un soutien à géométrie variable à Royal pendant la campagne du 1er tour et que certains ont visiblement fait le pari qu'elle allait trébucher. Ils font ce pari depuis l'apparition de Royal dans le paysage. Mais manque de chance, cela ne se produit pas. Je pense que cela sera plus difficile pour eux, compte tenu de son score, ils sont obligés de se mobiliser dans la campagne du 2e tour.
Sachant que derrière, il y a les législatives, et que le scénario le plus favorable pour le PS et pour les députés socialistes qui veulent être reconduits et pour les candidats qui veulent être élus, c'est quand même celui d'une victoire de Royal. Je pense donc que les calculs et les arrière-pensées pour 2012 vont être temporairement mis de côté.
Tocqueville : Sur quels thèmes le rapprochement entre PS et UDF peut-il se faire ?
Michel Noblecourt : Je ne pense pas qu'il puisse y avoir un rapprochement en termes d'appareil entre PS et UDF. Je pense que ni l'un ni l'autre ne le souhaite. En revanche, il y a un certain nombre de thèmes sur lesquels il y a d'évidentes convergences entre socialistes et centristes. Je pense à la réforme des institutions. Royal propose une République nouvelle, la VIe République, avec un renforcement des pouvoirs du Parlement, l'instauration d'une démocratie plus participative et l'introduction d'une dose de proportionnelle pour l'élection des députés. C'est un point auquel l'électorat centriste est particulièrement sensible.
Je pense aussi qu'il peut y avoir des convergences sur la question de l'Europe. Aussi bien Royal que Bayrou étaient favorables à un nouveau traité après l'échec du référendum de 2005, et ils étaient l'un et l'autre partisans d'un nouveau référendum pour faire ratifier ce traité, probablement en 2008. Autre thème traditionnel : celui de l'Etat impartial, déjà évoqué par Raymond Barre en 1988, repris par Bayrou, et dans son intervention de dimanche, Royal a explicitement repris cette volonté de bâtir un Etat impartial.
Enfin, il y a aussi la préoccupation pour ne pas dire l'urgence écologique commune aux deux candidats, Royal et Bayrou, qui ont tous les deux signé le pacte de Nicolas Hulot et ont mis l'exigence environnementale au coeur de leur campagne. leia mais
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